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La Gazette Du NFD

CLIMAT D’INVISIBILISATION :
Soleil sur tout le pays, sauf sur Boujenah.
Zone grise persistante autour du charisme.

LA VÉRITÉ INTERDITE ENFIN PUBLIÉE

POURQUOI PERSONNE NE PARLE DE LUI? LE MYSTERE RESTE ENTIER 

Il était né à Marseille, Vitto Boujenah. En 1900. Pas dans une clinique, non, dans un vacarme. Entre deux bagarres de boulistes et trois coups de sifflets de condés mal lunés. Sa mère aurait accouché sur un banc, son père serait parti chercher des clopes à sa naissance, et n’en serait jamais revenu – mais c’est peut-être juste une légende. De toute façon, Vitto n’a jamais trop aimé les fins heureuses.

Du cirage au cargo

 

 

À peine savait-il marcher qu’il cirait déjà les pompes des touristes, les mains pleines de cirage et les poches vides de scrupules. Quand il ne s’occupait pas des lacets des autres, il faisait le guet sur le Vieux-Port. Pour qui ? Pour tout le monde et pour personne. Les gros bonnets d’alors, les voyous d’opérette, les marchands de cigarettes à la sauvette… Bref, il était dans le décor. Comme le pastis tiède ou les pavés disjoints.

À 16 ans, il en a eu marre des gabians, des flics et des jours qui se ressemblent. Il a sauté dans un cargo de bananes à destination des États-Unis. Clando, évidemment. Légal, ça l’aurait étouffé. Dans la soute, il a fumé tout son stock de clopes, a parlé tout seul à des régimes de bananes, et a vu dans la coque du bateau son reflet avec un chapeau. Il s’est dit : « Je vais devenir un chef. »

Bouj of New-York

À peine débarqué à New York, il s’est fait repérer par le parrain du coin. Un type en costard blanc qui suçait des olives en regardant les gens mourir. Il a flairé chez Vitto ce mélange explosif d’audace, de tabac froid, et de mépris des règles. Vitto n’a jamais bu une goutte d’alcool, il a toujours voulu garder le contrôle, mais il en a fait passer des tonnes. De la contrebande à la chaîne, façon Henry Ford, sauf que les voitures étaient remplacées par des caisses de gnôle et les ouvriers par des types sans papiers, sans morale, sans souci.

Fric, Trafic et Freak-Show

Et puis, il est monté. Tranquille. Sans faire trop de bruit. Comme la moisissure ou les souvenirs. Il est devenu le président du réseau mafieux new-yorkais, tout en tenant un cirque improbable : femmes à barbe, femmes unijambistes, lanceurs de nains, avaleurs de sabres et acrobates dépressifs. Un monde parallèle où l’argent sale se lavait en jonglant.

C’était ça, Vitto. Le mélange entre Al Capone et Fellini. Un type qui, quand le milieu devenait trop lourd, allait fumer deux clopes en même temps sous un chapiteau, en regardant les éléphants faire caca.

 Une fin burlesque

Mais les légendes ont toujours une fin, et celle de Vitto fut aussi absurde que sa vie. Un jour d’octobre 1948, alors qu’il préparait un numéro de claquettes (oui, de claquettes, ce monde est fou), il a posé le pied sur le mât du chapiteau. Et la foudre – capricieuse, comme toujours – a décidé que ce serait l’heure.

Foudroyé. Net. Grillé comme une merguez oubliée au barbecue des enfers. Le type que personne ne pensait pouvoir tuer, même pas le cholestérol, est tombé raide, avec une cigarette à moitié fumée collée à la lèvre.

L’enterrement fut digne d’un roman de gare en surdose : femmes à barbe en larmes, nains en deuil, funambules noirs de chagrin, et même quelques barons de la drogue qui avaient sorti leur costard propre pour l’occasion. Tous alignés comme à un bal des monstres, en haie d’honneur devant l’église.

Vitto Boujenah est mort comme il a vécu : en plein numéro, en fumant, et en défiant le bon goût.

À suivre dans notre prochain numéro :
Un autre ancêtre de la dynastie Boujenah : Le chevalier Philippe Boujenah Ier dit l’aigle. En 1345 : « Il a affronté 1000 anglais et les a pliés en 4, une boucherie! »